« Pour être un bon homme politique, il faut soigner son langage ». Rétrospectivement, ces propos de Lassina Gondé ne manquent pas de sel. Pourtant, son parcours politique et sa vie semblent dichotomiques. Né à Bama d’un père commerçant de sel originaire de Ouahigouya, Lassina Gondé est le cadet d’une famille de onze enfants. Très tôt tuteur de ses jeunes frères, il s’adonne à la culture et au sport, particulièrement aux arts martiaux.
A 17 ans, il côtoie les premiers hommes politiques de sa commune à la suite d’une activité sportive. Il noue des relations amicales avec certains d’eux. Lorsqu’il découvre les liens chaleureux entre les hommes politiques de sa commune et ses concitoyens, il est touché par le virus de la politique. « Je serai député », lance le natif de Bama à ses coéquipiers. Mais une question taraude son esprit.
« Comment devenir député dans un milieu bobo, alors que je suis mossi originaire de Ouahigouya ? »
En ces années de galère, souvent de précarité, la famille Gondé ouvre les portes de la charité aux voisins. Nous sommes au milieu de l’année 1989. Lassina Gondé se souvient : « Les voisins venaient chez nous comme s’ils étaient chez eux, nous leur remettions nos nattes et nous dormions à terre. On s’aimait tout naturellement ». Avec ses camarades d’enfance avec lesquels il a fréquenté l’école primaire de Bama et le lycée Ouezzin-Coulibaly, il continue ses activités culturelles et sportives.
Endurant, il pratique assidûment le taekwondo et remporte son premier trophée et une ceinture noire en 1990. Ce sport renforce sa popularité et son estime auprès de ses amis. Il cultive alors un cercle d’amis qui lui voue une admiration, une admiration sans bornes. Il se rappelle : « J’étais accompagné des jeunes et des vieux qui m’ont poussé à croire en moi-même. J’ai compris dès lors que malgré mes origines mossi, j’étais estimé et aimé à Bama ».
« J’ai limité mes études, mais je ne regrette pas »
Aujourd’hui, Lassina Gondé est un champion en arts martiaux : ceinture noire deuxième dan en taekwondo. Mais le début n’a pas été facile pour lui. Après le décès de sa mère, le jeune Lassina quitte sa famille pour se rendre auprès de sa tante à Bobo. Mais il revient souvent dans son Bama natal qu’il chérit tant. Après le BEPC, il entre en seconde série B comptabilité et sort couronné, deux ans plus tard, du BEP en comptabilité. Face au déficit de moyens, il ne pourra plus continuer les études. Mais il fait plusieurs formations en banque et se retrouve à la BIP comme comptable.
Entre temps, il exerce des professions de clerc et d’huissier de justice chez maître Sékoura Coulibaly. Au temps de la Révolution, il a formé des gendarmes en arts martiaux, il a également été manager des juges. En 2006, il se présente aux élections locales, et est élu conseiller municipal sous la bannière de l’UPR. En 2012, il est propulsé à la tête de la commune de Bama sous les couleurs l’ADF/RDA. 18 mois après, l’insurrection a mis fin à son mandat.
Pour les législatives de 2015, il arrache, de haute lutte, les sièges de député et de maire. Homme de consensus, Gondé n’aime pas les confrontations et sait cultiver les bonnes relations avec tout le monde. Originaire d’une riche zone rizicole, il bénéficie du soutien des notables des campagnes dans le combat pour la mise en œuvre du barrage de Samandeni. Le début n’a pas été facile, à cause de ses origines mossi, mais il assure que les gens ont fini par le soutenir.
L’homme qui a fait le choix de faire la politique
Père de neuf enfants avec sept petits-enfants, Gondé dit allier correctement sa carrière politique à sa vie familiale. Même s’il se rappelle qu’au début, cela n’était pas facile. Lassina Gondé est croyant, mais n’exprime pas sa ferveur religieuse. « Homme doux », selon ses homologues de l’ADF/RDA, Gondé, selon ses propos, « déteste mettre les bâtons dans les roues des autres ».
Pour preuve, il dit avoir côtoyé pendant plusieurs années les maires et des députés des autres partis, avant d’être élu. « Celui qui dit que la politique n’est pas bonne, c’est faux », s’écrit-il. Pour lui, la politique, c’est le langage. Il invite par ailleurs les hommes politiques à soigner leur langage en ce sens que la parole a une puissance. D’ailleurs, il croit que si chacun change son langage, la paix règnera et le pays se développera. L’homme n’a qu’un seul message pour les jeunes : « patience et travail ».
« Qu’on garde le positif de moi »
Lassina Gondé tient beaucoup à son image. Même s’il ne doute pas de l’éphémère vie d’un homme, il souhaite en tout état de cause qu’on sache qu’il a bien vécu. Il veut qu’on garde de lui l’image d’un apôtre de la paix avec ses connaissances. En outre, il souhaite qu’on se souvienne qu’il était un battant, un optimiste et un positif. Il voudrait que la population de Bama se souvienne de sa contribution au développement de sa localité. Que ses militants sachent toujours que sa porte reste ouverte à tous.
Lassina Gondé, l‘homme aux multiples ambitions
Lassina Gondé a des ambitions énormes. « J’ai beaucoup à offrir, je suis toujours prêt à servir mon pays et ma population. ». Outre ses hectares de terrain qu’il exploite le long du barrage de Samandeni, son élevage, ses fermes agricoles, Lassina veut s’investir dans d’autres domaines plus rentables. Toujours à la quête des opportunités, Lassina Gondé dit : « Je veux me battre toujours pour toujours ajouter jusqu’à ma mort ».
Edouard Samboé (stagiaire)
Ledeputemetre.net